Parfois perçue comme une simple contrainte réglementaire, la transition écologique peut s’avérer être une véritable opportunité stratégique. Entre avantage concurrentiel, réduction de coûts à long terme et attractivité renforcée auprès des clients et candidats, comment transformer ces défis environnementaux en leviers de croissance ? Éclairage avec Claire Perset, fondatrice de CAN, société de conseil en RSE.
La transition écologique, entre contraintes réglementaires et défis opérationnels
La transition écologique représente un défi de taille pour de nombreuses organisations. S’appuyant sur son expérience tant dans le conseil qu’au sein de grands groupes, Claire Perset identifie plusieurs obstacles majeurs rencontrés par les entreprises au cours de cette démarche. « La complexité et l’évolution permanente des normes sont les difficultés principales », explique-t-elle. Cette complexité réglementaire crée une réelle fracture entre les grandes et les plus petites structures. Les grandes structures suivent de près les évolutions de la réglementation. À l’inverse, la situation est plus délicate pour les PME et TPE, qui manquent de moyens pour garder le cap face à la multitude de variations législatives.
Sur le terrain, les défis opérationnels sont nombreux. « Pour réduire leur empreinte carbone, les entreprises peuvent, par exemple, être amenées à repenser leurs flux de transport », illustre Claire Perset. Ces transitions peuvent s’accompagner d’investissements conséquents, qui se transforment en freins pour les entreprises. Autre défi majeur : le manque d’expertise interne, de nombreuses structures ne disposant pas des compétences techniques nécessaires à leur mise en conformité (analyse de leur impact environnemental, reporting extra-financier, etc.).
De l’audit à l’action : les étapes clés
Face à ces différents défis, Claire Perset recommande une approche méthodique, adaptée aux réalités du terrain.
- Réaliser un état des lieux complet et cartographier son impact environnemental
« L’idée, c’est de savoir d’où on part, afin de savoir dans quelle direction aller, précise l’experte. Vous devez mesurer votre empreinte carbone, votre consommation énergétique, faire le point sur la gestion de vos déchets, identifier vos principaux postes d’émission de gaz à effet de serre… »
- Définir des objectifs clairs
Ces objectifs doivent être alignés avec la stratégie globale de l’entreprise. « Il peut s’agir d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2040, de réduire ses déchets de 50 % en cinq ans ou d’améliorer l’efficacité énergétique de 30 %, illustre Claire Perset. L’essentiel est de définir des cibles précises, chiffrées et avec des échéances déterminées, permettant d’ajuster la trajectoire si nécessaire. »
- Mettre en place un retroplanning
Celui-ci décline les initiatives concrètes que l’entreprise mettra en œuvre pour atteindre ses objectifs, et peut s’étendre sur plusieurs années.
- Mesurer les progrès avec des indicateurs de suivi
Ces derniers permettent d’évaluer l’impact des actions engagées, de suivre les progrès et d’identifier les ajustements nécessaires.
- Impliquer l’ensemble des équipes
La transition écologique n’est pas un chantier à part, qui ne concernerait qu’une seule direction de l’entreprise, insiste Claire Perset. Il s’agit d’un chantier global, mené par tous. » Désigner des référents sur des thématiques dédiées, organiser des ateliers participatifs, valoriser les initiatives individuelles et collectives peuvent ainsi être des pistes de réflexion, pour que les enjeux environnementaux deviennent véritablement l’affaire de tous. « Au-delà de la simple sensibilisation, les organisations peuvent organiser des ateliers comme la Fresque du Climat, créer un réseau d’ambassadeurs en interne ou mettre en place des défis collectifs, tels que le Digital Cleanup Day, où chacun nettoie les données de son ordinateur », illustre Claire Perset.
La transition écologique, moteur de transformation
Si certains organismes se limitent au strict respect des obligations légales, d’autres choisissent d’aller plus loin en faisant de la transition écologique un pilier de leur stratégie. Claire Perset identifie plusieurs leviers d’action permettant d’accélérer ce processus tout en créant de la valeur ajoutée.
- Engager l’ensemble de son écosystème
Impliquer partenaires et prestataires est essentiel afin de créer un cercle vertueux sur cette thématique. Parmi les pistes de réflexion : une sélection de fournisseurs engagés, un sourcing responsable et la valorisation des circuits courts.
- Repenser son modèle avec une approche d’éco-conception
L’éco-conception ne concerne pas que les produits, les activités de service peuvent également être repensées afin de minimiser leur impact environnemental.
- Établir des partenariats avec des associations
« Il existe de nombreuses associations qui font vraiment un travail formidable. Mettre en place une collaboration est plutôt facile, et cela permet à l’organisme d’amplifier son impact positif tout en bénéficiant d’expertises complémentaires », précise Claire Perset.
- Formaliser sa démarche
L’adoption d’une raison d’être ou la transformation en société à mission permet de placer les enjeux sociaux et environnementaux au cœur de la stratégie de l’entreprise. « La France compte à peu près 2 000 entreprises à mission. Il s’agit d’une boussole pour l’entreprise : chaque décision est prise à l’aune de cette mission », souligne Claire Perset. En parallèle, engager une démarche de labellisation permet de structurer son approche environnementale et de gagner en crédibilité auprès des parties prenantes. Ces labels, soumis à des audits réguliers, encouragent également l’amélioration continue des pratiques.
Transformer les contraintes en opportunités stratégiques
Si les défis de la transition écologique sont bien réels, ses bénéfices stratégiques le sont tout autant pour les entreprises. Une démarche environnementale innovante permet ainsi de se démarquer et de répondre aux attentes croissantes des consommateurs en matière de responsabilité. Face à un marché de l’emploi en tension, il s’agit également d’un levier de fidélisation des talents. « Mettre en place une politique environnementale solide est aussi un atout RH, notamment vis-à-vis des plus jeunes générations, qui intègrent la politique RSE dans leurs critères de choix », précise Claire Perset.
La transition écologique facilite l’accès aux financements et aux marchés, renforce la confiance des parties prenantes, et peut – aussi bien à long terme qu’à court terme – générer des économies substantielles grâce à l’optimisation énergétique ou la réduction des déchets.
Pour l’experte, un facteur majeur accélérera inévitablement cette tendance. « Dans les prochaines années, les structures n’auront plus le choix face à la réalité du changement climatique, conclut Claire Perset. Le premier levier d’accélération, c’est tout simplement de voir ce qui se passe déjà sous nos yeux. » Les structures qui sauront anticiper ces évolutions et faire de la transition écologique un pilier de leur stratégie disposeront d’un avantage concurrentiel durable. Plus qu’une simple démarche de conformité, c’est un véritable levier de transformation et d’innovation qui s’offre aux organisations prêtes à relever ce défi.
Transition écologique : de la contrainte à l’avantage stratégique
18 mars 2025